mercredi 14 décembre 2011


La main d’œuvre agricole au GHARB
Rareté et nouvelles tendances à la production


OUZINE MEHDI, Ingénieur Agro-Economiste
52 Agriculture du Maghreb n°48 Décembre 2010


Dans l’élaboration de tout plan d’affaire agricole viable, nombre d’indicateurs et de ratios sont pris en compte: TRI, durée du retour sur investissement, marge brute… Mais, depuis quelques années déjà, un autre facteur limitant commence à être mis en avant, il s’agit du coût de la main d’oeuvre. Véritable nerf de la guerre dans tout projet à vocation agricole, ce facteur de production a tendance à subir une mutation radicale. Pourquoi donc cette main d’oeuvre qui faisait auparavant les beaux jours d’un secteur en pleine expansion tend à devenir un véritable frein au développement de plusieurs filières agricoles ? Analyse.


Si au Gharb, les avancées techniques ont permis une nette amélioration des rendements et une augmentation des marges à la production, la main d’oeuvre devient de plus en plus contraignante. Rare et indisponible lors des pics d’appels, on pourrait à première vue imputer cette tendance à l’exode rural, mouvement de transhumance accentué par la scolarisation plus généralisée des ruraux cette dernière décennie, mais est-ce la seule raison ? La rareté d’une offre qui ne comble plus les besoins croissants d’une région en pleine révolution verte entraînera sans doute une augmentation des salaires agricoles. A ce titre, le coût de la main d’oeuvre, surtout en période de pointe, a connu dans la région une hausse de l’ordre de 40% en moyenne, et pouvant même atteindre 80% pour certaines filières. Aujourd’hui, l’impact sur les coûts des produits agricoles n’est plus à démontrer. M. Mansour Chahyd, gérant d’un domaine agricole de la région, parle d’une augmentation d’environ 30% des charges liées à la main d’oeuvre sur les 5 dernières années. « Plus grave encore, nous sommes confrontés à une baisse de la productivité et les normes de production sont en nette diminution.



On se retrouve actuellement avec des ouvriers agricoles qui veulent travailler moins et gagner plus…». De nombreux exploitants ont déjà mis la clé sous la porte. Le temps où la main d’oeuvre était bon marché est définitivement révolu.



Mécanisation des tâches
Cet engrenage impose des orientations à l’amont, au niveau de la production. En effet, un autre phénomène résultant du changement qui s’opère au niveau du marché de l’emploi agricole, est l’adoption par un grand nombre de producteurs de la mécanisation progressive et quasi-totale de l’ensemble des taches agricoles qui étaient auparavant manuelles. Une tendance qui implique bien évidemment un coût supplémentaire pour les professionnels, qui y voient le prix de la sécurisation des opérations. Un coût qui leur épargne des phases creuses en terme de main d’œuvre et garantit une efficience optimale dans l’exécution des tâches, autre variable déterminante dans l’équation complexe qui caractérise la relation ‘’producteur - ouvriers agricoles’’.

On note également l’apparition de la gestion déléguée de la main d’oeuvre agricole, pratique jusqu’ici réservée au secteur industriel et tertiaire. Cette tendance se structure petit à petit via des offres de services qui commencent à se développer. Un service d’intérim et d’externalisation qui marque définitivement le basculement de l’activité agricole du simple secteur vivrier vers un modèle compétitif à la recherche permanente de performance et de minimisation des coûts.

D’autres modèles ont vu le jour dans la région, il s’agit entre autres des organismes de formation. Un des projets phares est celui développé par la Maison Familiale Rurale, établissement pédagogique basé à Belksiri, qui a pour mission de répondre à la problématique de l’éducation des jeunes ruraux. La MFR propose un cycle de formation qui prend appui sur les spécificités locales de l’agriculture marocaine et qui a déjà commencé à alimenter les domaines agricoles de la région en main d’oeuvre qualifiée, assidue et réceptive aux nouvelles techniques et pratiques agricoles.

Le constat est donc bien réel, une main d’oeuvre agricole qui commence à se faire rare, mais surtout peu efficiente à la production de l’avis des opérateurs. Si on ne peu que se féliciter de l’évolution positive du niveau de vie de l’ouvrier agricole, qui suit la tendance à la hausse de l’ensemble de ses homologues dans d’autres secteurs, l’impact de ce changement brutal l’est moins sur les performances de l’agriculture régionale…



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